Premières opportunités de marché pour la future récolte de blé et de colza
À l’heure où le marché mondial se raffermit, le blé français regagne en compétitivité par rapport aux blés roumain, ukrainien ou argentin. Une fenêtre pourrait s’ouvrir pour nos exportations.
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En ne suivant pas la dynamique des prix internationaux, l’origine française gagne nettement en compétitivité mais devra tout de même transformer l’essai au cours des prochaines semaines. Les opérateurs continuent également de surveiller l’avancée des semis au Brésil et l’évolution des conditions de culture en Amérique du Sud pour le soja et le maïs. La politique vient se mêler du complexe oléagineux en Europe. Entre menaces commerciales contre les États-Unis et mise en application du règlement européen contre la déforestation (RDUE) en janvier 2026, le doute s’installe.
Le blé français regagne de la compétitivité
Le prix du blé français se consolide actuellement et s’affiche en légère baisse sur la semaine, de 1,50 €/t, pour revenir à 224,00 €/t en base juillet rendu Rouen. À l’heure où le marché mondial se raffermit, l’origine française peut se repositionner et retrouver de la compétitivité par rapport aux blés roumain, ukrainien ou argentin. Du côté de la Russie, les opérateurs sont confrontés depuis le 15 février à l’application d’un quota à l’exportation, qui limitera les volumes disponibles jusqu’à la fin de la campagne.
Dans ce contexte, les exportateurs français attendent patiemment le retour des acheteurs internationaux, et notamment du Maroc, un débouché privilégié cette année en l’absence de l’Algérie et de la Chine. Si la demande devrait certainement revenir en ancienne campagne, les regards se tournent également du côté de la nouvelle récolte.
Les craintes sont déjà nombreuses et les conditions de culture de l’Hexagone se sont dégradées au cours de l’hiver. Selon FranceAgriMer, seulement 73 % des surfaces sont notées en bonnes ou excellentes conditions à l’échelle nationale. C’est nettement en dessous des 86 % de l’entrée de l’hiver. Ces notations sont par ailleurs en ligne avec le cycle catastrophique de l’an passé et incitent certains opérateurs à revoir d’ores et déjà en baisse les potentiels de rendement.
La période de risques climatiques s’ouvrira bientôt en France tandis que les craintes sont déjà présentes de l’autre côté de l’Atlantique. Une vague de froid a traversé la zone de production de blé d’hiver aux États-Unis cette semaine, avec des températures inférieures à –20 °C.
Face à cela, la couverture neigeuse hétérogène pose question pour la protection des cultures. Si l’impact de ces températures ne sera pas visible avant la reprise de végétation du printemps, ces inquiétudes ont entraîné quelques rachats de positions de la part des fonds sur le marché américain.
Les prix des maïs français et internationaux divergent
Les marchés européens et internationaux du maïs divergent. En France, le prix du maïs cède 1,00 €/t sur les deux dernières semaines, pour s’afficher à 207,00 €/t rendu Bordeaux, restant ainsi bien ancré dans le canal des 205,00 à 210,00 €/t en place depuis le début de l’année 2025.
Après avoir favorisé l’orge fourragère, les fabricants d’aliments du bétail portent désormais leur attention sur le blé fourrager. Le maïs peine donc toujours à trouver sa place au sein des formules au vu de ses problèmes de qualité. Pour autant, d’ici à l’arrivée de la prochaine récolte de céréales à paille, le complexe fourrager européen devra s’appuyer sur des importations de maïs pour s’équilibrer. Avec quelques flux de maïs américain, notamment vers l’Espagne et le Portugal, l’évolution des tensions commerciales entre l’Union européenne et les États-Unis sera à surveiller, même si la place aux négociations est toujours bien présente.
Outre ces exportations vers le Vieux Continent, le maïs américain est actuellement très demandé sur la scène internationale. C’est ainsi que le prix du maïs américain dépasse désormais 230 $/t Fob Golfe, soit une hausse de près de 15 $/t depuis le 1er janvier. La demande internationale pour le maïs américain pourrait même s’intensifier en cas d’accident de production en Amérique latine.
En Argentine, après le sec caniculaire de janvier, le retour des pluies rassure mais les températures restent élevées. Seules 19 % des surfaces sont en bon ou excellent état, ce qui reste bien moins que les 28 % de l’an passé. À l’inverse au Brésil, après les précipitations incessantes de janvier, les semis de maïs safrinha s’accélèrent enfin et près de la moitié des surfaces sont désormais emblavées au Mato Grosso.
Les opérateurs commencent également à porter leur attention sur les futures surfaces de maïs dans l’hémisphère Nord. Aux États-Unis, les premières estimations seront apportées lors du prochain Forum de l’USDA, le ministère de l’Agriculture américain, les 27 et 28 février prochains.
L’huile de palme à l’origine de tensions
La graine de colza prend un nouvel élan haussier grâce au soutien du marché des huiles. L’accalmie sur le marché de l’huile de palme du mois de janvier n’est plus. En l’espace de trois semaines, le cours de l’huile de palme rebondit de 10 % à Kuala Lumpur (Malaisie), pour évoluer de nouveau au-dessus des 4 800 MYR/t. La tension sur les stocks est vraie aussi bien chez les principaux pays exportateurs que chez les importateurs.
La publication du rapport de l’Office malaisien de l’huile de palme (MPOB) a souligné le ralentissement saisonnier de la production. Malgré des exportations encore en recul, les stocks malaisiens ne se reconstruisent toujours pas. Il en est de même en Indonésie où en plus de cela, le déploiement du nouveau biodiesel B40 sera effectif dès le mois de mars.
Chez les importateurs, la Chine et l'Inde disposent toutes les deux des stocks sur leur niveau le plus bas des cinq dernières années. Face à ce risque d’un retour massif de la demande, un rationnement se met de nouveau en place. Cette situation pourrait persister jusqu’au mois d’avril, avant une reprise de production plus importante des palmeraies.
Ainsi, à Rotterdam, l’huile de palme vient se négocier sur des prix spot au plus haut depuis juin 2022 proche des 1 600 €/t. Les huiles de colza et de tournesol accompagnent à moindre allure ce mouvement, mais gagneront mécaniquement de nouveaux débouchés. L’huile de colza gagne 2 % au cours de la semaine et évolue désormais à 1 093 €/t.
Ce regain d’intérêt soutient également le prix de la graine qui évolue désormais 533,00 €/t Fob Moselle, soit une hausse de 10,00 €/t depuis le 14 février. Cette fermeté sur l’ancienne campagne tire mécaniquement la nouvelle. La graine de colza de la récolte de 2025 dépasse pour la première fois le seuil des 500,00 €/t à 504,00 €/t Fob Moselle. Cela correspond à un gain de 19,00 €/t depuis le début de l’année.
Une trituration internationale toujours dynamique
Face à la faiblesse des stocks de palme, tant chez les grands importateurs qu’exportateurs, l’huile de palme à Kuala Lumpur renoue avec ses plus hauts niveaux testés en novembre et décembre derniers. Ce regain de fermeté se répercute sur les autres huiles végétales internationales, qui restent néanmoins plus compétitives que l’huile de palme. Cela incite les triturateurs à maintenir une activité industrielle soutenue.
Aux États-Unis, 5,79 millions de tonnes de soja ont été triturées en janvier, selon l’Association américaine des transformateurs d’oléagineux (Nopa). Il s’agit du second record historique après le mois de décembre et un record pour le mois de janvier.
En Europe, la trituration de colza s’est accélérée avec plus de 1,6 million de tonnes de graines triturées en janvier, un plus haut niveau depuis août et l’arrivée des volumes post-récolte. Les importations de canola devront rester dynamiques pour maintenir cette cadence d’ici à la fin de campagne.
Quant à la trituration européenne de soja, elle reste très soutenue depuis plusieurs mois, pour répondre aux besoins des industriels après les récoltes décevantes de tournesol et de colza. Cependant, la géopolitique se mêle des besoins à l’importation de l’Union européenne. Les tensions croissantes avec les États-Unis, d’une part, et la mise en application, d’autre part, au 1er janvier 2026 du règlement contre la déforestation ciblant notamment le Brésil, remettent en question à court et moyen terme l’approvisionnement européen en graines de soja.
C’est dans ce contexte que le prix du tourteau de soja délivré Montoir gagne cette semaine 6 €/t, à 368,00 €/t sur le spot, ce qui reste néanmoins à proximité des plus bas de campagne. À souligner que l’avancée de la récolte brésilienne attendue record à 169 millions de tonnes, soulage les opérateurs internationaux. Après le retard de janvier, plus de la moitié des surfaces sont désormais moissonnées, en ligne avec la progression des années précédentes.
(1) Société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, qui nous livre son analyse agricole hebdomadaire.
À suivre : évolution de la parité de l'euro par rapport au dollar ; contexte politique sur les taxes à l’importation entre l’Europe et les États-Unis ; exportations de blé français vers les pays tiers sur la campagne en cours ; évolution des conditions de culture pour les céréales d’hiver dans l’hémisphère Nord ; avancée des semis d’orge en Europe ; perspectives de semis de maïs et soja de la nouvelle campagne aux États-Unis à l’approche du Forum sur l’agriculture de l’USDA ; Suivi des conditions de culture en Amérique du Sud ; évolution du bilan en palme en Indonésie et Malaisie.
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